La Commission européenne (CE) a publié le 7 mars un Livre vert sur une stratégie européenne en matière de déchets plastiques dans l’environnement , en consultation jusqu’à début juin 2013.
A travers 26 questions, ce Livre vert interroge les Européens sur les mesures à prendre pour limiter l’impact des déchets plastiques sur l’environnement et dresse un constat relativement complet de la problématique tant d’un point de vue sanitaire que d’un point de vue de la préservation des ressources naturelles.
La CE note ainsi que si les matières plastiques sont entièrement recyclables, seulement 21,3% des déchets plastiques produits en Europe en 2008 ont été recyclés. L’une des causes mises en avant est "la multitude des additifs utilisés dans la production [qui] peut constituer un obstacle majeur pour le recyclage (…) ou déboucher sur un "sous-cyclage" plutôt que sur un recyclage tout au long du cycle de vie". Dès lors, "une moindre utilisation de substances dangereuses dans les matières plastiques permettrait d’augmenter leurs possibilités de recyclage", mais aussi de diminuer les risques sanitaires liés à la présence de perturbateurs endocriniens parmi ces additifs, qui "s’accumulent dans les tissus corporels, avec des effets potentiellement cancérigènes et mutagènes".
La CE appelle notamment à réfléchir au cas des déchets d’emballages, qui "représentent 63% du total des déchets plastiques produits" et pour lesquels la matière plastique est utilisée "comme produit bon marché, qui n’est le plus souvent pas réutilisable ou dont la réutilisation n’est pas prévue". Si en matière d’éco-conception la CE ne propose que des actions volontaires, elle reconnaît, pour la première fois dans une communication officielle, l’existence de "l’obsolescence technique ou programmée" et préconise d’agir contre ces "conceptions [qui rendent] la réparation des produits en matière plastique non rentable ou même techniquement impossible". Mais le principal cheval de bataille reste la "prolifération de produits jetables à usage unique et à brève durée de vie", à commencer par les sachets plastiques qui "contribuent inutilement au volume de déchets plastiques présents dans le milieu marin", une pollution qui constitue pour les auteurs du Livre vert "l’un des problèmes environnementaux les plus critiques à l’échelle planétaire". Recycler, d’accord, mais réduisons d’abord… et ce n’est pas faute de l’avoir dit et répété !
Concernant les mauvaises performances de recyclage des plastiques des Européens, la CE pointe du doigt "un net contraste entre les exigences législatives [liées à la hiérarchie européenne des déchets] et les pratiques actuelles de gestion des déchets". Au vu de la disparition du terme "incinération" au profit de celui de "valorisation énergétique", la CE semble oublier une fois de plus que tous les incinérateurs européens ne peuvent prétendre à ce statut. Elle montre par contre que la "valorisation énergétique" des plastiques semble largement privilégiée, à l’image de l’Allemagne "où 60% des déchets plastiques sont actuellement incinérés" au détriment du recyclage. Pour modifier ce rapport de force, la CE préconise l’utilisation d’instruments économiques comme les taxes environnementales pour éviter qu’une interdiction de mise en décharge ne crée "un "appel d’air" en faveur de la valorisation énergétique", au détriment du recyclage. Ces considérations viennent légitimer, s’il en était besoin, la victoire des associations qui ont obtenu du Grenelle de l’environnement que l’incinération soit soumise à la Taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) et le travail que fait le Cniid depuis plus d’un an au sein du Réseau action climat pour promouvoir une fiscalité écologique et incitative sur les déchets.
Contact :
Delphine Lévi Alvarès
Chargée de mission "Incinération et stockage des déchets"
delphine@cniid.org