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Le point sur... La transposition de la directive cadre déchets
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Le 11 janvier 2011,

La directive cadre européenne sur les déchets a été transposée par ordonnance en droit français en décembre dernier. L’ordonnance modifie plusieurs articles de la partie législative du code de l’environnement concernant les déchets.
Il faut souligner qu’une partie des dispositions de la directive cadre européenne avaient déjà été prises en compte lors de l’élaboration des lois Grenelle, notamment concernant la prévention des déchets et les objectifs chiffrés de valorisation matière.

La hiérarchie mise à mal

La clef de voute de la directive cadre est la hiérarchie qui impose par ordre de priorité de réduire les déchets à la source, de les réutiliser, de les recycler, de les valoriser et enfin de les éliminer, c’est-à-dire les incinérer « sans récupération efficace d’énergie » ou les enfouir.
 Le Cniid regrette que la transposition française prévoie des possibilités de dérogation à la hiérarchie de la gestion des déchets. L’ordonnance précise notamment qu’une dérogation peut être acceptée si elle est prévue dans un plan de gestion des déchets. Autrement dit, la hiérarchie n’existe que si les documents de planification ne s’y opposent pas ! Et quand bien même cette dérogation ne figure pas dans un plan, la hiérarchie peut également être contournée pour un flux de déchets si cela est justifié compte tenu des effets sur l’environnement et la santé humaine, et des conditions techniques et économiques. Soulignons que les effets sur l’environnement et la santé humaine ne font pas le poids en général face à la prise en compte des conditions économiques. Dans ce cas, le détenteur ou le producteur de déchets tient à disposition de l’autorité compétente les pièces justificatives.
Autant dire qu’il n’existe pas de garanties solides sur l’application effective de la hiérarchie.

Une transposition à minima

La collecte sélective de certains flux de déchets (notamment papier, métaux, plastique et verre) est "imposée" à tous les producteurs mais seulement dans la mesure ou "cette opération est réalisable d’un point de vue technique, environnemental et économique" comme l’indique la directive cadre. Elle n’est donc toujours pas obligatoire. En outre, aucune date de mise en œuvre n’est précisée alors que le texte européen impose que ces collectes soient mises en place au plus tard en 2015. La France aurait pu aller plus loin que la directive en proposant des mesures sur la séparation à la source des biodéchets des ménages mais elle ne l’a pas fait. On demeure ainsi dans un contexte législatif où l’introduction de cette collecte sélective relève du bon vouloir des élus, généralement très peu motivés sur ce sujet.

La France n’a pas transposé la définition de la valorisation énergétique dans l’ordonnance alors que le texte européen dresse une liste précise d’opérations de valorisation, dont la valorisation énergétique, cette dernière étant appréciée, pour l’incinération, au regard d’une formule de calcul déterminant l’efficacité énergétique des incinérateurs et leur statut (unité de valorisation ou d’élimination). Si la formule de calcul de l’efficacité énergétique a été reprise dans l’arrêté ministériel sur l’incinération du 3 août 2010, l’absence de définition dans le texte français laisse une possibilité d’usage abusif du terme de valorisation énergétique, ce que les exploitants font déjà depuis plusieurs années.

L’exception française des déchets ultimes

La France conserve l’exception sémantique des "déchets ultimes" comme étant les seuls déchets pouvant êtres stockés en décharge. Mais la définition des déchets ultimes est toujours aussi floue puisque le caractère ultime s’apprécie, encore une fois, au regard des conditions techniques et économiques du moment. Le Cniid avait proposé pour plus de clarté d’instaurer une liste départementale non exhaustive et évolutive de déchets « non ultimes », comme par exemple les biodéchets ou les déchets inclus dans les consignes de tri.


Des déchets qui n’en sont plus

La transposition de la directive prévoit la possibilité de la sortie du statut de déchet pour certains produits et substances. Les critères de la sortie du statut de déchet sont décidés au niveau européen. Cette mesure aura pour impact principal de favoriser le commerce et l’exportation de certains produits et substances. L’un des critères exigés pour qu’un produit ou une substance puisse sortir du statut de déchet est que « son utilisation n’ait pas d’effets globaux nocifs pour l’environnement ou la santé humaine  ». Mais cela ne peut être vérifié dans tous les cas : un déchet qui sort du statut de déchet peut être plus facilement exporté, notamment vers les pays du Sud, où il sera impossible de vérifier que l’utilisation n’aura de facto aucun effet nocif pour l’environnement ou la santé humaine.

Partant d’un texte de base peu ambitieux, la France n’a pas su, ou n’a pas voulu, aller plus loin dans sa transposition, en proposant par exemple de véritables garde-fous pour préserver la hiérarchie ou empêcher les incinérateurs de faire valoir abusivement leur statut d’unité de valorisation énergétique. Cette directive vise en partie à fluidifier le marché intérieur de substances et produits autrefois considérés comme des déchets en les sortant de ce statut contraignant en terme d’exportation.
Enfin, introduire la possibilité pour les incinérateurs d’être considérés comme unités de valorisation énergétique induit également des facilités dans le transfert transfrontalier de déchets : ces deux évolutions pourraient entraîner une augmentation du « dumping » environnemental au niveau international.

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