Association Cniid - Centre national d’information indépendante sur les déchets - http://cniid.fr

logo du site Accroche
français français
    FaceBook RSS Ver Youtube   
S’informer Dossiers thématiques Newsletter Nos publications FAQ Pour aller plus loin Liens utiles Presse

Les risques environnementaux et sanitaires liés à l’incinération
Partager cette page


Le Cniid informe, depuis plus de 10 ans, sur les liens entre incinération et risques sur l’environnement et la santé. Malgré les évolutions réglementaires et technologiques, le procédé d’incinération reste un producteur et un diffuseur de substances polluantes dans l’environnement, avec des effets sur la santé humaine.

L’émergence des normes d’émissions des incinérateurs

Avant 2002, en France, aucune limitation n’était imposée aux incinérateurs, dont les émissions n’étaient pas contrôlées. Seules quelques recommandations d’exploitation étaient données dans un arrêté de 1991. En 2000, une directive européenne vient fixer pour la première fois des normes d’émissions pour les incinérateurs (en 1989 une première directive européenne imposait seulement une limite pour les poussières et le monoxyde de carbone).

C’est pendant la période légale de transposition de la directive par les Etats, en 2001, qu’éclate le scandale de la contamination à la dioxine par l’incinérateur de Gilly-sur-Isère. Ce sont des concentrations de dioxine 750 fois supérieures aux normes européennes de 2000 qui sont relevées autour de cet incinérateur savoyard. Outre la contamination des troupeaux et des produits laitiers, ce sont 82 cancers qui sont constatés à proximité de l’usine. 200 riverains portent alors plainte. Malheureusement, l’existence d’un temps de latence entre l’exposition à des substances cancérigènes comme les dioxines chlorées et l’apparition de la maladie empêche encore aujourd’hui les scientifiques d’établir un lien de causalité indéfectible. "La mise en danger de la vie d’autrui" ne sera pas reconnue et les victimes n’obtiendront donc pas justice.

C’est donc seulement en 2002 qu’est pris le premier arrêté fixant des normes d’émissions contraignantes aux incinérateurs, en transposition de la directive européenne de 2000. Si ce n’est pas le scandale de Gilly qui a déclenché l’adoption de cette réglementation, il en a sans doute été l’un des accélérateurs et il a permis l’émergence dans le débat public de la problématique "santé et incinération".

Les limites de la réglementation

Si l’arrêté de 2002 a le mérite d’exister, il convient d’attirer l’attention sur le fait qu’il ne réglemente qu’une vingtaine de polluants (dioxines et furanes, 9 métaux lourds etc.) sur plus de 2000 molécules mesurées en sortie de cheminée. Certains polluants, dont les effets, y compris combinés, sur la santé sont mal ou méconnus, sont donc émis dans l’atmosphère en dehors de tout contrôle. De même, l’évolution de la composition de nos biens de consommation, et donc de nos déchets, introduit de nouvelles substances potentiellement toxiques sur lesquelles ni la science, ni le législateur ne se pencheront avant d’en avoir constaté les effets néfastes et donc qu’une fois que le mal sera fait.

Avec le nouvel arrêté incinération d’août 2010, un prélèvement en semi-continu des dioxines est obligatoire. Cette nouvelle évolution montre bien que les normes de 2002, présentées pourtant comme "sûres", n’étaient donc pas suffisantes.

Au-delà des normes en vigueur, ce sont les contrôles de ces dernières qui posent problèmes : insuffisants et souvent non inopinés, des rejets importants se produisent toujours, notamment pendant les nombreuses phases d’arrêts, de redémarrage et de dysfonctionnement des fours où les systèmes d’épuration et d’analyses peuvent alors être interrompus.

Ce n’est pas "la dose qui fait le poison"

Les différents polluants émis par l’incinération se retrouvent dans l’environnement par différentes voies. Une partie de ces substances chimiques est "bioaccumulée", c’est-à-dire qu’elles sont intégrées en l’état par les éléments naturels qui deviennent alors des sources de contamination potentielle pour l’homme.

Les rejets gazeux

Les fumées de l’incinération sont chargées en nombreuses molécules plus ou moins toxiques pour l’environnement et l’homme. Celles-ci se fixent sur les particules fines et ultrafines que les systèmes de filtration des incinérateurs ne sont pas en mesure de capter totalement. Ces particules sont transportées par les vents dans la zone entourant l’incinérateur, et parfois bien au-delà. Lorsqu’elles retombent, les polluants qu’elles transportent se fixent sur les végétaux et peuvent contaminer la chaîne alimentaire jusqu’à l’homme.

Les mâchefers

Les mâchefers (appelés MIOM pour mâchefers d’incinération d’ordures ménagères) sont les résidus solides récupérés à la base du four de combustion. Ils correspondent en tonnage au tiers des déchets brûlés (3 300 000 tonnes produites en France). Ces déchets, qui contiennent métaux lourds et polluants organiques (dioxines), sont disséminés sur le territoire, le plus souvent utilisés en sous-couche routière. Aucune réglementation contraignante n’existant encore à ce jour, leur potentiel polluant est très largement sous-évalué.

Les rejets liquides

Dans le cas d’un traitement "humide" des fumées de l’incinération, le processus génère des effluents liquides hautement toxiques puisqu’ils contiennent les polluants qui ont été extraits des fumées. Ces rejets liquides sont "pré-traités" à la sortie de l’usine avant d’être renvoyés dans le réseau des eaux usées, encore chargés de nombreux polluants.

Les résidus d’épuration des fumées (REFIOM)

Pour "nettoyer" les fumées de l’incinération, on utilise plusieurs produits chimiques supposés captés une partie des polluants. Une fois le traitement effectué, ces produits chimiques et les polluants dont ils sont chargés sont récupérés. Ce sont les REFIOM. Hautement toxiques, ils sont envoyés en centre de stockage spécialisé pour déchets dangereux. Ils représentent une source de pollution diffuse de l’environnement à long terme.

Pour certains polluants, comme les dioxines, plusieurs scientifiques insistent sur le fait que ce n’est pas "la dose qui fait le poison", mais la durée de l’exposition. Ainsi, les normes, si strictes soient-elles, sont certes nécessaires mais très loin d’être suffisantes. L’InVS a publié en 2008 les résultats d’une vaste étude épidémiologique [1] qui montrent qu’autour des usines ayant fonctionné dans les années 1980 et 1990, l’incidence de certains types de cancers dépassent de 7 à 23% la valeur de référence. Pourtant, à cette époque, les industriels laissaient entendre que seule de la « vapeur d’eau » sortait des cheminées, discours encore très largement utilisé aujourd’hui. L’InVS insiste également sur le fait que, pour mesurer les effets des incinérateurs fonctionnant aux normes d’aujourd’hui, il faudra attendre la fin d’une période de latence de 5 à 10 ans. Les risques ne sont donc pas écartés, et le renforcement progressif des normes montre qu’il est impossible de garantir l’innocuité d’un processus comme l’incinération, dès lors qu’il implique de multiples réactions chimiques.


JPEG - 4.3 ko
This will be shown to users with no Flash or Javascript.