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Le point sur... La Taxe générale sur les activités polluantes (TGAP)
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Le 22 octobre 2009,

La création d’une taxe générale sur les activités polluantes (tgap) sur l’incinération, en plus de celle sur le stockage, était une demande du Cniid, finalement retenue dans le cadre de la loi de finances 2009. Les collectivités ont tendance à présenter cette taxe uniquement comme une pression fiscale supplémentaire, sans expliquer ce qu’elle représente exactement et quel usage sera fait de l’assiette collectée.
« Un point sur » la tgap s’impose.

Que dit la loi ?

Fondée sur le principe du « pollueur-payeur », c’est une fiscalité incitative visant à taxer les activités polluantes pour réduire le recours à ces dernières ou du moins limiter leurs impacts environnementaux. Elle a été instituée par la loi de finances 1999 et est entrée en vigueur le 1er janvier 2000. Elle est codifiée dans le code des douanes (article 266 sexies).

La tgap s’applique à différents secteurs (carburants d’origine fossile, production d’huiles usagées, de lessives, de matériaux d’extraction, imprimés non sollicités,...). Dans le secteur des déchets, elle s’appliquait jusqu’en 2008 aux déchets entrant en centres de stockage et à l’élimination des déchets industriels dangereux. Elle a été étendue depuis 2009 aux déchets non dangereux (déchets ménagers et assimilés) entrant en incinérateur. La loi de finances 2009 fixe une progressivité dans l’augmentation des taux de tgap au cours des années.

Certaines activités sont par ailleurs soumises à une tgap proportionnelle à leurs émissions polluantes (ex. oxydes de soufre et autres composés soufrés, acide chlorhydrique, oxyde d’azote et autres composés oxygénés de l’azote, poussières totales en suspension). Les usines d’incinération de capacité supérieure à 3 t/h sont assujetties à cette tgap sur les émissions polluantes en plus de la nouvelle tgap créée.

Pourquoi taxer le stockage et l’incinération des déchets ?

Les « bénéfices » tirés des traitements des déchets par incinération ou stockage sont toujours mis en avant par les industriels (exemple bien connu de l’utilisation de l’énergie produite) qui en tirent de substantiels avantages financiers (vente d’électricité, vente de chaleur, vente des métaux issus des mâchefers par exemple). Gagner de l’argent sur des avantages supposés est un élément, mais payer pour les effets négatifs en est un autre.

Pourtant, le caractère polluant de ces deux modes de traitement est avéré, quelle que soit l’éventuelle utilisation faite de l’énergie issue des déchets. De nombreux dommages environnementaux et sociaux n’étant pas pris en compte par le pollueur dans l’évaluation de ses coûts, la puissance publique se doit d’intervenir pour y intégrer ces « externalités » invisibles : la tgap apparaît comme un moyen économique de rendre visible une partie de ces externalités.

Taxer l’incinération et la décharge n’est donc pas une augmentation artificielle des coûts existants. La tgap se fonde sur une estimation « monétaire » des impacts : c’est une mesure parmi d’autres à mettre en place pour aller vers une gestion plus écologique des déchets.

Le code des douanes mentionne que les exploitants « peuvent répercuter la taxe afférente dans les contrats conclus avec les personnes physiques ou morales dont ils réceptionnent les déchets » (article 266 decies). Ce qu’ils ne manquent jamais de faire pour garder leurs marges bénéficiaires : au final c’est donc la collectivité et le citoyen qui paient. Ce transfert de charges sur la collectivité doit l’inciter à détourner les déchets du stockage et de l’incinération.

Quelques exemples d’externalités négatives liées au stockage et à l’incinération : pollution locale et globale, à court et à long terme, impacts sanitaires, nuisances pour les riverains, perte de valeur du foncier,...

Quels sont les objectifs de la tgap ?

L’engagement 245 du Grenelle avait pour objectif de « renchérir progressivement et de façon lisible le traitement (incinération et stockage, ndlr) afin de favoriser la prévention et le recyclage : augmentation de la tgap sur les décharges et création d’une taxe sur les incinérateurs, modulée en fonction de l’efficacité environnementale et énergétique, selon un calendrier progressif et lisible sur plusieurs années, et affectée en retour à des mesures de prévention ». Le Grenelle 1 a sensiblement élargi le spectre de la réaffectation à la « mise en œuvre de la nouvelle politique de gestion globale des déchets, en particulier en termes de prévention, de valorisation matière et de recyclage ». Espérons que la prévention ne sera pas laissée à nouveau de côté.

Contrairement aux dernières années, l’assiette de tgap sera redistribuée par l’intermédiaire de l’ADEME afin d’aider financièrement les collectivités au développement de la prévention et de la valorisation matière : ce plan de soutien atteint 411 millions d’euros entre 2009 et 2011. Il est primordial d’expliquer aux citoyens que cette taxe est une incitation à la réduction et au recyclage : moins de déchets iront en décharge ou dans un incinérateur, moins le montant de la taxe sera élevé. En retour, les aides sur investissements nécessaires pour développer la valorisation matière augmenteront. Cette première année de transition n’est pas représentative des montants réaffectés et ces derniers vont augmenter dès l’année prochaine.

Quelles sont les limites de la situation actuelle ?

Dans ses propositions, le Cniid avait précisé que le montant final des tgap décharge et incinération devaient être proches de façon à éviter un simple transfert des déchets des centres de stockage vers les incinérateurs d’une part et à réellement avantager la valorisation matière d’autre part.
Malheureusement, il est à craindre que les taux de tgap incinération restent trop faibles pour être réellement incitatifs (entre 1,5 et 7 euros/tonne) alors même que le MEEDDM avait fait des projections en 2007 (avant le Grenelle) entre 10 et 20 euros/tonne incinérée.
Les exploitants bénéficient en outre de modulations très nombreuses de tgap aussi bien sur le stockage que sur l’incinération pour payer le moins possible. L’incinération bénéficie ainsi de 7 cas de modulation à la baisse, suivant (voir montant des taux de tgap) : la certification, le niveau de performance énergétique, les transports alternatifs, les émissions d’oxydes d’azote,... Ces reculs sont apparus notamment dans le cadre du débat parlementaire de la LOF 2009 où les parlementaires ont « détricoté » le travail réalisé sur les montants arrêtés en groupe de travail.

Ces modulations « cadeau » ne suffisent apparemment pas aux industriels qui exigent toujours plus : les exploitants d’incinérateur demandent par exemple une exonération totale pour les usines les plus efficaces énergétiquement ... comme si un incinérateur efficace ne polluait plus. Les centres de stockage ne sont pas en reste et pourront être exonérés de tgap s’ils fonctionnent en mode « bioréacteur ». Là encore, l’esprit de la tgap est battu en brèche et l’impact polluant de ces installations est nié.

Il faut souhaiter que la loi de finances 2010 n’engendre pas de nouveaux reculs qui dénatureraient un peu plus les tgap existantes.

Contact :
Delphine Lévi Alvarès

- Plus d’infos sur le site des douanes, notamment la page concernant les montants des taux de tgap

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